Djam Karet
Vous ne trouverez pas un cercle
d'amateurs de progressifs, pas un site spécialisé, pas un, qui, tôt ou
tard, vous parlera du cas DJAM KARET. Et souvent en bien. A mon humble
avis, une rectification mérite d'être faite d'emblée ; si le groupe partage
avec le susdit mouvement cette propension souvent reprochée pour de longues
expositions instrumentales et un goût pour une imagerie plus ou moins
mystérieuse, la musique de DJAM KARET ne répond pourtant pas aux canons
du genre. Certes, à ses débuts, on a pu percevoir l'influence de KING
CRIMSON, on a pu aussi les voir collaborer avec d'anciennes gloires
de l'école progressive, si bien qu'ils ont fini par trouver refuge dans
ce petit ghetto, mais, je me répète, l'univers de DJAM KARET lui est propre.
Oubliez les références que vous lirez à gauche et à droite. Elles n'ont
pas raison d'être. DJAM KARET est un groupe de fusion. Point. Ils développent
une musique exclusivement instrumentale où les changements de thèmes,
plutôt rares, sont alternés plus que superposés. Tout cela constituant
le matériau de base qui permettra aux deux guitaristes de broder des solii
interminables et souvent fatiguants. Plutôt négative comme critique, non
? Eh bien, oui, parce que très franchement je pense que c'est la quasi
confidentialité de ce groupe qui a assuré son succès auprès des initiés
plutôt que sa musique, assez lourdingue et bien trop verbeuse. Pourtant,
DJAM KARET a sa place ici, car, si on peut douter de la pertinence de
leur art, cela ne les a pas empêché pour autant de livrer, malgré tout,
quelques galettes qui valent tout de même le détour. Et non, ça ne me
fait pas mal de le dire !
L'aventure débute en 1982 sous le nom de HAPPY CANCER. Une cassette circule
au doux titre de McMusic for the McMasses dont certaines plages
feront leur chemin jusqu'à leur premier enregistrement sous le nom de
DJAM KARET, The Ritual Continues, en 1987. On retrouve Mike Henderson
aux guitares, Chuck OKEN Jr. Derrière la batterie et aux claviers, et
Henry OSBOURNE à la basse, tandis qu'Andy FRANKEL, lui aussi aux percussions,
et John GLASS à la guitare, cèderont bientôt leur place à Gayle ELLETT
qui deviendra l'immuable seconde guitare. Depuis cette époque, la formation
est restée inchangée. Mais attardons nous sur ce premier album ; tous
les aspects du DJAM KARET que l'on connaît sont déjà là, partagé entre
ces duels incendiaires de guitares (Technology and Industry)
et des passages franchement ambient (Revisiting a Quiet Place).
Depuis, toute la carrière de ce groupe s'articule autour de ces deux axes. Suivi en 1989
par un Reflections from the Firepool qui utilise la même recette mais de
manière moins fraîche et moins convaincante, il faudra attendre 1991 pour que DJAM KARET
développe encore plus l'aspect conceptuel de cette dualité avec la publication
simultanée de Burning the Hard City représentant le côté improvisation
virtuose, et Suspension & Displacement s'attardant pour sa part au côté
ambient. Avec ce disque, DJAM KARET signe là d'ailleurs une de ses plus belles
réussites, montrant que souvent les plus belles chosessurgissent avec un minimum de
retenue.
Trois ans plus tard, le groupe revient avec un projet singulier, logiquement appelé Collaborator
qui met, bout à bout, douze collaborations avec des artistes aussi divers que Jegg
GREINKE, Steve ROACH ou Kit WATKINS. Le résultat est assez déconcertant, un cas à part
dans la discographie du groupe, et qui souffre peut-être d'une utilisation trop extensive
des instruments Midi. En 1997, DJAM KARET revient à sa formule de départ avec
The Devouring qui renoue avec l'équilibre de leur premier essai. Son compagnon, Still
No Commercial Potential, tiré à 750 exemplaires, issu des mêmes sessions, servira
surtout à conforter l'image d'un groupe "exclusif" puisque la musique s'y
révèle être sans surprise, ne justifiant pas son
édition limitée. Opération qui sera d'ailleurs renouvellée en 2001 avec Ascension,
sous-titré New Dark Age Vol.2...
Après plus de dix ans d'activités, le groupe publie enfin un album en concert, Live
at Orion (1999) qui représente vraiment le point de départ idéal pour toute
personne désireuse de se pencher sur le phénomène ; la prestation est solide et le
choix des titres pertinent. Vu le contexte, l'aspect ambient du groupe n'y trouvera
malheureusement pas sa place. Enfin, dernièrement, comme signalé plus haut, un nouvel
album dix titres, New Dark Age est publié en 2001 où DJAM KARET, excepté une
orientation plus acoustique sur certains morceaux, ne semble pas éprouver le désir de
changer une formule qui ne marche peut-être pas mais qui lui sied à merveille, les
passages ambient étant réduits à présent à leur plus simple expression, comme des
parenthèses, des respirations entre deux morceaux plus électriques.
S'il est indéniable qu'ils font preuve de grand talent, peut-être faudrait il aussi
admettre que leur musique n'a rien de farouchement transcendant ; un sentiment d'autant
plus accentué quand on tient compte de la réputation dont jouit le groupe alors que
d'autres formations plus courageuses et méritantes n'ont pas droit à autant
d'attention...
(D.S)
Quelques liens sur le sujet:
http://www.djamkaret.com