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Höyry-Kone

 

J'ignore si le fait de les avoir vu en concert influence considérablement ma perception du groupe mais voilà, HÖYRY-KONE est sans conteste à mes yeux une des dix meilleures formations à avoir émergé des années quatre-vingt dix. Évoluant à huit, avec la présence d'instruments aussi parlants que le violon ou le violoncelle, la formule du groupe s'articule autour d'une perpetuelle balance entre un côté néo classique très marqué et une section rythmique très en verve, qui n'a pas à souffrir de comparaisons avec des formations du giron métal alternatif.

 

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C'est le bassiste Jan Erik LILJESTRÖM d'ANEKDOTEN qui, tout à fait par hasard, rencontre les membres du groupe finnois à un concert londonien de David ALLEN ! Le courant passe tellement bien entre eux que LILJESTRÖM les recommande au label suédois spécialisé Ad Perpetuam Memoriam. Les sessions s'échelonnent sur cinq mois et "La Machine à Vapeur" (traduction littérale du nom du groupe) publie en 1995 "Il est possible d'aimer les
insectes" (Hyöntesisiä voi Rakastaa). Si ce dix titre intrigue autant par son titre, par l'esthétique de l'objet, et par les sonorités inédites de la langue
finlandaise, ce premier album, même si accueilli avec enthousiasme, est presqu'un coup dans l'eau tant la production laisse à désirer. Étouffée, sourde, plate, elle ne rend pas justice à la dynamique que l'ensemble est capable de déployer. Pourtant, dès Örn en ouverture, on comprend qu'on a affaire à une bande de joyeux drilles qui revisitent à la fois MAGMA, ZAPPA et même Mr.BUNGLE ! Aux côtés des frères HÄNNINEN (TEEMU à la batterie et TUOMAS aux guitares), on retrouve deux alliés décisifs : Jussi KÄRKKÄINEN qui vient en appui idéal pour reconstituer le duo Adrian BELEW-Robert FRIPP (notamment évident sur Hämärän Joutomaa) et le bassiste Jarno SARKULA, à mi chemin entre Jannick TOP et Les CLAYPOOL. Mais la botte secrète du groupe est ce diable de Topi LEHTIPUU, un chanteur de coffre, issu du répertoire classique et qui ne donne pas encore ici la pleine mesure de son talent, le chant étant partagé par le très anodin Jukka HANNUKAINEN qui quittera d'ailleurs le groupe peu de temps après la publication de ce premier album. L'apport de LEHTIPUU va vite se révéler essentiel ; chanteur exceptionnel, on l'aura compris, mais aussi violoniste et compositeur, il illumine littéralement de ses interventions des titres inoubliables comme Kosto, très néo classique avantqu'un pont démentiel où l'archer triture littéralement le violoncelle vienne perturber l'apparente tranquilité de la pièce, basculant de fait dans une bande sonore de film d'horreur, ou encore, en bout de course, Myrskynmusiikia au lyrisme irrésistible, perpetuellement contrebalancé par des passages instrumentaux aux constructions enchevêtrées.

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Il faudra attendre l'album suivant pour que HÖYRY-KONE séduise enfin les plus sceptiques. De retour deux ans plus tard, Huono Parturi (1997) (le coiffeur fou) révèlera un groupe que l'on savait déjà passionnant. Si les compositions du précédent album démontraient sans embage une vraie
mâturité dans l'écriture, Huono Parturi va enfoncer le clou à plus d'un titre, dans plus d'un secteur et de fort belle manière. L'avancée considérable repose bien sûr sur la production qui enfin met en avant, comme il se doit, le jeu étriqué des guitares, la rondeur de la basse, la souplesse des instruments à cordes et l'éclat des cymbales. Pour compenser le manque de conviction de la batterie, Peter NORDIN, toujours d'ANEKDOTEN, est venu prêter main forte sur deux morceaux (Lumisaha et Tottele) qui, à peu de choses près, adoptent la configuration du double trio du KING CRIMSON renaissant en faisant la part belle à une cacophonie bien agréable. L'aspect néo classique est toujours bien présent avec un sublime
Beata Viscera en guise d'introduction et joué a cappella, ou le très beau Ullakon Lelut. La cerise sur le gâteau étant, vous vous en doutez, l'assurance que prend désormais Topi LEHTIPUU, qui se montre infaillible dans tous les registres possibles et imaginables. Le contraste entre la violence tangible, la folie latente de la musique et le lyrisme du chant fonctionne ici plein pot. Et en évitant l'écueil des débordements démonstratifs mais en restant dans un format raisonnable et sans démesure à outrance, HÖYRY-KONE signe là tout simplement un disque fait pour durer des décennies et qui deviendra bien assez tôt une référence.

Mais tout cela n'est pas très réaliste. Dans un monde comme le nôtre, une si jolie histoire ne peut se terminer sur une fin si idyllique. Si Ad Perpetuam Memoriam a été le tremplin vers une plus large diffusion, un différent les a assez vite opposé au groupe, ce qui a eu pour conséquence immédiate la fin d'un contrat liant les deux parties. Malheureusement pour nous, Huono Parturi a fait les frais de cette mésaventure si bien qu'aujourd'hui, l'album n'est tout simplement plus disponible ! Des échos répétés laissent présager une réédition, mais pour une question de droits, ce projet est à chaque fois remis à plus tard... Encore plus triste, c'est la décision de Topi LEHTIPUU de quitter définitivement le navire. On ignore si le gel des activités du groupe en fonction de ces problèmes contractuels en sont la cause, néanmoins, le chanteur a décidé de poursuivre sa formation de chant dans un répertoire classique.

Du coup, pour ne pas rester sans rien faire, on a pu retrouver le violoncelliste Marko MANNINEN au sein de UZVA, une jeune formation finnoise acoustique purement néo classique et teintée du folklore du pays, alors qu'un bon 4/5ème de HÖYRY-KONE officie désormais sous la bannière de ALAMAAILMAN VASARAT (les marteaux de l'enfer) et dont le premier album, Vasaraasia, publié en 2000 est un brûlot de trash klezmer music (!) qui peut-être perçu comme une évolution logique du groupe (le titre Baksteri sur Huono Parturi en est vraiment fort proche), désormais orphelin de son chant, et dont la vitalité se communique de manière plus contrastée mais toujours aussi vivifiante.

(D.S)

 

 

Quelques liens sur le sujet: 

http://www.sci.fi/~hoyrykon